-
Par Chachlik le 3 Février 2010 à 17:24
Histoire…
Tordons le cou à quelques idées en vogue dans cette France hypertrophiée du rachis culturel. L’Afrique et l’Homme africain sont bel et bien entrée dans l’Histoire ! Ce fut une belle entrée, par la grande porte, théâtrale mais sans effraction qui se déroula il y a 2 à 2,2 millions d’années quand singes qui n’en étaient plus tout à fait (australopithèque boiséi) inventèrent les premiers outils. Le plus étonnant, c’est que d’une certaine manière, cette Histoire perdure jusqu‘à nos jours.
Je ne sais pas - et je m’en fiche assez d’ailleurs - si Lilian Thuram est un footballeur à la tête bien pleine ou un intello perdu au milieu de footballeurs (selon de nombreuses définitions, le football est un sport réputé pour ses joueurs stupides… J’ignore au final d’où vient cette condescendance mais là n‘est pas le propos de la missive). Ce que je sais en revanche c’est que notre Lilian national a eu une épidermie de génie : écrire un livre sur les oubliés (tous Noirs ou presque) de l’Histoire. Bien sûr, il aurait été préférable que le livre qu’il vient tout juste de commettre n’ait jamais eu à être écrit. Parce qu’il semble tellement évident que l’Afrique et plus généralement le peuple noir disposent d’un panthéon de talents, qu‘un ouvrage de vulgarisation - si bien foutu soit-il - devrait être superflu.
Il n’en est rien.
Car effectivement l’éducation reste à faire dans notre foutu pays et nous sommes bien loin de la République post-raciale chère à Tutu. Les Américains qui viennent d’élire un Obama ont également du souci à ce faire si j’en juge par le l’écrasante majorité de leurs congénères qui considèrent la théorie de l’Evolution comme un fadaise et préfèrent dès lors se tourner vers le messianisme à rebours des crétins créationnistes.
Pour revenir à Lilian Thuram et à son livre « les Etoiles noires », j’ignore si j’aurais commencé ce panthéon avec Lucy (prénom bien trop européen à mon goût et qui doit sa renommée à une équipe franco-américaine) ou si j’aurais puisé plus loin encore dans les racines possibles de nos origines avec cet impossible Homme de Toumaï qui agace prodigieusement quelques paléontologues, tenant d’une origine Est-africaine comme constitutive du genre humain ; je pense en particulier à la très médiatique (mais bien peu sympathique) Brigitte Senut.
Il y aura toujours un risque à débuter un inventaire dédiés aux Lumières des peuples noirs par un Humanoïde d’un genre Homo (même éteint) mais conservant des aspects physiques primitifs à côté de caractères déjà beaucoup plus modernes. La conjuration des imbéciles veillent au grain. Elle aurait tôt fait de nous remettre une couche de théories éculées sur les peuples supposés primitifs et leurs origines. Or, cette cohorte d’abrutis - qui se gargarisent de savantes formules pour masquer l’indigence de leur racisme - a désormais l’occasion de s’exprimer en masse sur la toile via les innombrables forum qui polluent notre quotidien : micro actualité commenté jusqu’à satiété… Boulevard de cleps qui pissent une diarrhées verbales sur les com des autres… Nom de guerres débilifiant en guise de signature… Territoires virtuels bardés de miradors où les paranoïas les plus achevées côtoient la bêtise primordiale… Brute comme un diamant… Connections nerveuses branchée en directe live sur le réseau… Ligne plate… Humanité d’autant plus navrante que son cortex est à l’intelligence ce qu‘un scenario de télénovelas est au récit.
Donc et malheureusement, oui, en France au 21e siècle, il y a encore une petite majorité d’ahurissant connards pour croire qu’il y a plusieurs races humaines et non un seul genre homo sapiens sapiens. Ce serait perdre son temps de leur expliquer que l’autre race humaine potentielle, la dernière en date tout au moins, Neandertal, s’est éteinte il y a plusieurs dizaine de milliers d’années, ils y perdraient leur silex. Inutile de leur dire que les différences de pigmentations ne déterminent pas des races différences mais qu’elles sont simple caprice de la nature, comme une panthère noire et un léopard tacheté sont bien une seule et même espèce.
Car Thuram a raison : la connerie est une des choses les mieux partagées au monde. Comme lui, je me souviens précisément de ces âneries que j’entendais plus jeune. Telle cette vieille rombière dans un lavomatic de la Rue de Javel, Quinzième arrondissement de Paname, qui vînt me chuchoter à l’oreille qu’elle savait bien elle - eh eh, pas folle la buse - quel était le chaînon manquant entre le singe et l’homme. Moi qui craignait qu’elle détrône soudainement Charles Darwin et développe face à mes yeux éberlués une brillante théorie néo-évolutionniste, j’en fus quitte pour une douche froide. Non la bonne dame n’avait rien d’un Prix Nobel et son chaînon manquant empruntait davantage à Gobineau qu’à Charly… petit énoncé issu du racisme ordinaire et dont l’explication tenait en une toute petite phrase : « le chaînon manquant ce sont les négros ! »
Pour être marié à l’Afrique et à une africaine, je partage donc - sans la vivre dans mon corps blanc - la souffrance, la lassitude et la colère des Thuram et de toutes les autres étoiles noires de la terre… Parce que soyons honnête, ça reste difficile face à un tel abime de connerie d’être un « négro » spirituel… on peut être en revanche d’une humanité militante. C’est-ce que Lilian Thuram a fait.
Son livre vient donc à point nommé : c’est écrit ! Et je ne suis pas le seul à en dresser les louanges.
Par mes études (Histoire) et mon parcours militant (JCR à l’époque tendance égalité sociale puis chez Les Verts avant d'être enfin tenté par l'apolitisme) je connais la plupart des « étoiles » qui y sont mentionnées, y compris les moins renommées, de Rosa Park à Frederik Douglass, de Marcus Garvey à Frantz Fanon. Je n’aurais pas forcément placés les pharaons même le nubien Taharqa dans ma propre liste « d’étoiles » - notamment parce que du fait de leurs origines kouchitiques ils appartenaient à l’époque davantage à l‘Asie qu‘à l‘Afrique. De la même manière, si l’on veut rester précis, qu’on est obligé de séparer du monde noir les cultures arabo-andalouse et berbères qui se sont épanouies au Maghreb. Mais, d‘une part ces réserves sont négligeables, d‘autre part, à vouloir trop cloisonner, on prend le risque d‘ignorer les relations d‘interdépendances qui ont préexistées à toute les civilisations humaines (ceci étant le didactisme commande parfois d‘être aussi précis que possible).
De toute manière, même en ayant éliminé l’Egypte et le Maghreb, ce qu’il reste de l’Afrique a encore de quoi nous faire rêver : de brillants empires, des réalisation architecturales prodigieuses, une Histoire belle, compliquée, tourmentée : d’Axoum à Juba, des peuples Khoï aux hommes du Fouta-Djalon, du royaume Songhaï à celui d’Abomey ; sans oublier les langues et des cultures créoles nées de de la servitude. Et combien d’hommes et de femmes de génie ? Rien qu’en Afrique de l’Ouest, on pourrait citer la reine Hangbe qui créa le corps des Amazones au XVIIe siècle, le roi Adan-dozan qui refusa l‘esclavage et fut l‘un des premiers à expérimenter dans son intimité la mixité des couleurs, ou plus près de nous les premiers révoltés qui tentèrent de mettre un frein à l’expansion coloniale : de Lat Dior Diop (1842-1886) qui se comparait lui-même à un arc qui ploie sans rompre à l’Almamy Samory Touré (1830-1900) qui de la Guinée à la Haute-Volta entra en résitance contre la France impérialiste; les pères de la décolonisations, les révolutionnaires, les socialistes d’Amilcar Cabral (1924-1973) à Thomas Sankara (1949-1987), en passant par Nkwame Nkrumah (1909-1972) ; et puis enfin, dans la diaspora américaine, les combattants des droits civiques, de Toussaint Louverture à Angela Davis jusqu'au pasteur Martin Luther King. Tous ceux-là ont marqué l’Histoire de l’Humanité de leurs empreintes !
D’ailleurs dans une perspective véritablement post-raciale, il faudrait ajouter à côté de ces personnages édifiants quelques parfaites saloperies, sans animosité particulière, juste pour faire bonne mesure.
Rendre justice, dire la vérité, poser une Histoire objective est une autre manière de rendre justice à l’Afrique et à sa diaspora : elle n’a donc pas plus le monopole de la vertu que celui de l’horreur. Ainsi Ahmed Sékou Touré, Mobutu Sese Seko, Idi Amin Dada, et les Hutus de la radio Mille Collines, pour ne citer que quelques-uns des plus immondes, font aussi partie de l’Histoire de l’humanité, même s’il s’agit dans le cas présent de sa face sombre. Mais, n’est-ce pas chose semblable en France ? En Allemagne ? Sinon comment comprendre que ces deux nations aient été capables de produire pour l’une des bouchers mégalos à la mode Napoléon ou Louis XIV, pour l’autre un malade mental et criminel contre l’humanité ? Car la France est aussi la terre qui a vu naître Victor Schœlcher (1804-1893) et l’Allemagne la patrie de Goethe (1749-1832). L’un comme l’autre était déjà des hommes dont l‘esprit n’était pas enfermé dans l‘idée des nations, des races ou des frontières.
Pour masquer leur ignorance autant que par calcul (économie de la rapine d’abord, pillage des ressources ensuite, visée politico-électorale depuis), l’Occident a colporté l’image d’un peuple noir sans Histoire, incapable de se défendre ou de se gouverner. Pourtant l’Histoire de l’Afrique est suffisamment riches d’anecdotes pour revigorer l’imagination de nos écrivains germanopratin ou pour truffer de références le médiocre discours d’un sénateur.
Ainsi en est-il de cette tragique histoire qui se déroula en Ethiopie au milieu du 19e siècle : le Négus Théodore II était un type du genre têtu qui n’aimait guère qu’on se mêle des affaires de son royaume. Après avoir emprisonné le consul britannique, il dû faire face à une armée levée par la reine d’Angleterre de 32.000 soldats et quarante éléphants. La déconfiture était prévisible. L‘armée du Négus fut balayée. L‘homme qui ne supportait pas de vivre sous le joug d‘un envahisseur étranger choisit alors la seul issue qui lui paraissait raisonnable : il se suicida… Ironie du sort, le malheureux Théodore usa à cette fin le revolver que la reine Victoria lui avait offert quelques années plus tôt, témoignage de « l‘amitié de la Grande-Bretagne pour l‘Ethiopie » …
Toutes les tragédies ne furent pas systématiquement à sens unique. Les Zoulous du roi Cetewayos vengèrent en une seule journée 250 ans de vexations coloniales… La jolie déculottée qu’ils infligèrent aux rosbeef du Gouvernement Disraeli à Isandhlwana en 1879 reste un must de l’histoire militaire. Elle inspira par la suite de nombreuses guérillas mais elle reste étonnamment absente tant des manuels de guerre que de nos livres d’Histoire. Pourtant des sagaies assegai victorieuse de mitrailleuses Lewis, ça a de la gueule… Attends mon Colon, tu trouves pas que ça fait une Histoire bien épique ? Du grain à moudre pour Hollywood ? Du bouquin nobélisable ?
Et que dire de la culture ?
Un Paul Ahyi (1930-2010) qui vient de nous quitter, n’a pas été juste un généreux sculpteur togolais mais un touche-à-tout de génie respecté par la communauté mondiale. De la même façon que les poèmes de Cheikh Anta Diop (1923-1986) me consument les boyaux, la littérature de Césaire interroge l’humanité toute entière… Et comment rester insensible à l’universalité d’Ousamn Saw ou de Basquiat ?
Soyons honnête n’aurait été la révolution technique qui toucha l’Europe au Moyen-âge et la prédation exercé par les puissances navales occidentales sur le Nouveau-Monde, l’Afrique n’aurait peut-être pas accusée un tel retard et la face de l’Histoire en eut été changée.
Il y eut bien quelques tentatives de résistance et, à l’aube du 19e siècle, un Ménélik II su faire montre de sa déterminations, contre les troupes Italiennes. L’humiliante défaite qui en découla inquiéta jusqu’aux chancelleries européennes. A juste titre, la bataille d’Adoua fut comme un coup de tonnerre dans un ciel serein : déjà, elle annonçait les Indépendances…
Alors de grâce, qu’on cesse de nous ressasser les éternelles images d’Epinal sur l’Homme noir, qui ne serait pas encore assez entré dans l’Histoire… Il y est entré et en beauté : nul besoin d’avoir attendu la splendeur d’Imam Bowie ou la grâce féline d’Halle Berry pour s’exclamer : Black is beautiful ! Déjà 1300 ans avant Jesus-Christ, on louait la beauté mais aussi l‘intelligence de la Reine noire du Kamet, la resplendissante Tyie… Quant à la mulâtresse Solitude (Rosalie de son prénom d’esclave), elle su montrer à l’aube du 19e siècle, dans la Guadeloupe de l’esclavage, que sa vénusté n’avait d’égale que son esprit de révolte. Avec les nègres marrons, elle avait combattue enceinte les troupes françaises. Capturée par le Général Richepanse, elle survécu deux mois à son ennemi. Condamnée à mort, elle fut exécutée le 29 novembre 1802, au lendemain de son accouchement, sur ordre de Napoléon. Elle avait moins de trente ans.
On dira pour finir que les étoiles sont toujours là, autour de nous, resplendissantes… elles scintillent avec toute la luminosité requise par leur fonction d’étoiles. Il suffit juste de savoir un peu mieux regarder. On est toujours stupidement naïf mais au final, comme il serait plaisant un monde où la couleur de peau cesserait d’avoir de l’importance.
Mon étoile noire n’est pas princesse mais elle en a les atours. Elle vient de Somalie. Un pays qui malgré la guerre offre un intérêt incomparable. De la mosquée de Zeila aux canyon du Puntland, des rives du fleuve Shabbele aux Montagnes du Sanaag. Je parle de chose simples, intelligibles pour tout un chacun…
Et pour conclure, je parle de moi et de mon étoile noire : ma femme.
Photo (personnes pendant le festival des divinités noires, Aného, Togo) : Le Coati
4 commentaires -
Par Chachlik le 7 Janvier 2008 à 17:47
Ça schlingue au milieu de nowhere... On est toujours dans une ville de daube. La mienne est la capitale d'un pays balisé... Demain une révolution surviendra qui conduira un populiste de l'Ouest au pouvoir. Castré par les bourreaux du précédent dictateur m'a-t-on dit. Un revanchard qui redonnera la fierté aux masses laborieuses, les opprimés, les sans-grades, les innombrables domestiques du Kenya futuriste.
En attendant, ça smell sérieux dans les églises le cadavre de mômes crâmés. Et Dieu s'en contrefout un peu, c'est pas vraiment son bizness, lui les massacres interethniques... Kikuyus, Luhias, Luos, Sabbaot, Kambas, Turkana, et caetera, ça s'étrippe à tout vent. PNU contre ODM, bleu contre orange, on se croirait revenu à Byzance. Deux vieilles badernes qui s'accrochent au pouvoir pendant que 600 pauvres gusses sont trucidés au nom des intérêts particuliers... Avec Moï vieux lion sénile en embuscade...
Pour le reste, je veux rien savoir, je participe du désordre olfactif ambiant. J'hume bien l'air de quelques restaurants pour expat branchouilles, des boites aux néons rapiécés, des filles aux jupes en jachère. Je flaire, je musarde, je dandine Georges, ça me ressemble bien.
Je ne sais rien faire d'autre que me lamenter... Le seul truc, vieux comme le monde, qui me sauve, c'est ma lucidité.
Je suis donc j'essuie les plâtres. Au plafond, les murs se fissurent et mes rides affichent la fin de trentaine... Un truc qui mène à la mocheté.
« Tu t'aimes tellement » m'a dit un ami que tu te sauves toi-même. Il a raison, il a tort. J'aimerais une fois ne pas m'aimer suffisamment pour éviter d'impliquer en ces lignes la femme que j'aime... Mais je ne m'aime pas suffisamment alors, pour forcer le trait, séduction affichée, je suis obligé de m'aimer pour les séduire... Afin de parler d'elles. Vous n'y comprenez plus rien ? Normal...
Elles me transposent et je dénie le droit à quiconque de dire que je ne les aime pas. Simplement, je les aime toujours aussi mal.
Ceci dit, demain, dans quelques mois, je vais faire un truc con : venir te chercher sur Rapta road en scelle étincelante, passer ton campound, toquer à ta porte avec les éperons, faire hennir le cheval blanc, en costume de ville, cravate mauve, la chevelure au vent...
Je gage que tu m'ouvriras. Et là tu t'écriras : Mon Dieu (Allah) mais c'est le Prince Charmant !
Crois-moi mon Diamant, je songe à la faire.
Photo : Le Coati
5 commentaires -
Par Chachlik le 2 Décembre 2007 à 19:41
C'est un pays fantôme, reconnu par aucune nation de la planète, c'est un pays qui n'existe sur aucune carte, c'est un pays sans ambassade, doté d'un aéroport minuscule, c'est une entité séparatiste... Mais c'est un vrai pays avec une capitale, Hargeisa, un Président, des institutions, une armée, une police, des pompiers, des commerces, des bagnoles, des filles généralemnt jolies, voilés ou non (mais généralement très sérieusement excisées), de l'argent par liasse ou en brouette, du soleil, de la poussière, des vestiges archéologiques et une histoire coloniale inspirée par les Godons... C'est un pays qui n'existe pas mais c'est aussi un pays plein de vie... Celui du plus fascinant peuple nomade de la planète : Les Somalis (Issak)... Bienvenu au Somaliland... Et si vous ne savez pas quoi faire de votre flouze, putain, c'est pas le moment de tergiversez, ici, il servira bien à quelque chose : Ministères, hôpitaux, musées, routes, tout est à reconstruire... L'avantage du Somaliland ? La paix y revenue... C'est donc un des rares coins de cette zone où j'ai eu le sentiment de rencontrer des Somaliens heureux... Un des rares coins de Somalie où l'on pourrait presque faire du tourisme... Tiens, je suis certain que cela les rendrait même heureux mes Somalilandais de voir débarquer des touristes en culotte courte... Avec ou sans tourista dans le calbute !
Photo (un des Mig de Siad Barre qui bombarda Hargeisa au début des années 90 devenu le monument national) : Le Coati
4 commentaires -
Par Chachlik le 31 Octobre 2007 à 11:46
De mes nostalgies d'enfance, il me reste un imaginaire paradoxal qui emprunte à des couvertures jaunies ou à des titres chocs : « Attentat Rue des Rosiers ! », « Si le Shah bascule ! », « Mort d'Anouar El Saddate »...
25 ans plus tard il est étrange de constater que deux des hebdomadaires que la famille lisait le plus fréquemment dans la FrançAfrique d'alors sont toujours disponibles... Et qui plus est en Afrique anglophone.
Le Nouvel-Obs d'abord : son côté catho de gauche n'a jamais cessé de s'accentuer... et de m'exaspérer. La veine péremptoire et bien-pensante, sans doute.... mais il reste lisible, surtout quand on perd pied avec la mère patrie. Je conviens cependant que je préférais l'Obs d'antan à la pâle copie d'aujourd'hui.
En revanche, Jeune Afrique l'intransigeant me plaît toujours autant. Alter-mondialiste avant l'heure, ce canard se montre parfois un peu complaisant pour les quelques fripouilles présidentielles qui affament l'Afrique depuis plus d'un quart de siècle but on the other hand leurs dénonciations de toutes les sales magouilles de l'Occident dans le Continent Noir continuent à être percutantes.
Au final, davantage que la lecture des différents articles, c'est la mémoire des images qui me procure la plus grande satisfaction. L'iconographie imparfaite des années 70-80 avait quelque chose de séduisant. Même quand on causait d'un assassinat ou d'une prise d'otage, les photos en couleur ou en noir et blanc qui illustraient l'article, avec leur grain si particulier, le cadrage millimétré des photographes qu'on appelait encore des Reporters de guerre, jusqu'à la conception graphique un peu naïve, tout cela permettait encore de voyager malgré l'horreur.
L'enfance et ses réminiscences afférentes agissent toujours comme un puissant élixir mêlant jouvence et conservatisme. Il n'empêche qu'à lire l'Obs ou Jeune Afrique, j'avais alors le sentiment que le monde n'était pas finit. Qu'il conservait sa part de mystère. Que l'Afrique était mal partie mais qu'elle avait de la ressource. Qu'après Cabral, Sankara, le Che noir prendrait la relève et que le néocolonialisme mordrait la poussière...
L'Afrique est aujourd'hui le putain de trou-du-cul de l'Occident où les pandémies, le chômage et les Américains sévissent. L'espoir s'est éloigné à grande enjambée du côté des nouveaux riches d'Asie ou d'Amérique du Sud...Et pourtant merde de Dieu, j'ai renoué avec mes lectures d'enfance ! Je le clame comme un cri révolutionnaire et inutile. Pour que demain le petit mioche qui grandira sûrement dans un ventre nomade revendique aussi « le droit à la nostalgie ». Et que dans son mini cortex d'individu en devenir, il se fasse sa collection personnelle de souvenirs du monde qui pourrait être.
Loin des images lisses des Paparrazi du war-show-bizness ou des photos amateurs de photographes auto-proclamés. Loin de cette comédie d'un loft planétaire décérébrant... que les médias et leurs images dégoulinantes nous vendent au prix de notre âme comme le reflet du monde réel.
Photo : Le Coati
4 commentaires -
Par Chachlik le 4 Juin 2007 à 21:06
- il est déjà là , en embuscade, fétide avec ses ratiches de carnassier et sa mauvaise haleine... Il joue les cadors, babines toutes retroussées, l'oeil vitreux, sa cervelle préhistorique en guise de conscience philosophique. Le pire c'est que c'est un animal politique. Il se pique de faire du chiffre, du chiffre et ce faisant il flatte les bas-instincts des animaux serviles...
- Allons rêveur, qu'est-ce que tu me chante donc-là ?
- Tu n'as pas remarqué, ami ? Un détail ne te choque pas ?
- Non, je ne vois pas...
- Je suis un rêveur noir, une gueule d'ébène, un Bamboula... Si tu veux mon avis, maintenant est arrivé le temps des rêves balisés... L'imagination avec un garde-frontière... Bientôt, tu verras les centres de retentions ne vous suffiront plus, vous en viendrez au contrôle de mes humeurs vagabondes et vous empêcherez mes pensées de franchir les océans....
Photo (L'Homme du Lac Naivasha) : Le Coati
7 commentaires
Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique